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A+A- : Ecrits d'âme d'une jeune psy
21 février 2014

Vous-Voie-Ment et Mr M

Mr M, 30ans, a entrepris une démarche de soin psychologique depuis un mois. Sa démarche fut motivée par le deuil d'une relation amoureuse à faire... "Deuil" dont lui parlent ses proches et séance psy qu'ils lui conseillent... Deuil qu'indéniablement, il ne pourra réaliser en tant quel tel (cinq phases dans le deuil), car cette personne est toujours vivante. Comment lui faire entendre dans une telle détresse affective, qu'en psychologie, nous ne parlons "de deuil" et d'acceptation, lorsque le sujet est encore susceptible de recevoir des signes de vie de la personne dont il s'est séparé, de plus, lorsqu'il est enclin à rester en contact avec elle pour s'accorder sur quelques biens qu'ils avaient en commun, ou ne serait-ce, la garde des enfants, par exemple. De surcroît, celui-ci reste "ami" avec cette personne sur le réseau social facebook, ce qui génère que plus de douleurs et d'interrogations à la vue de "son bonheur partagé avec un nouvel homme" sur des photos postées. "Deuil", là encore, un bien grand mot communément employé... Ô combien spécifique à ce qui vient à demeurer sans Vitalité.

Celui-ci mal à l'aise et se décrivant comme timide vacille entre une parole purifiante évoquant son mal-être et un discours rôdé, cadré sur notre société. Le mécanisme de défense "l'intellectualisation" est vivide chez ce patient...  Mécanisme relié de plus, à une culture certaine chez cet homme. Je dois moi-même me protéger et ne pas me laisser emporter par divers sujets qu'il amène avec beaucoup de philosophie... Philosophie qui n'est que séduisante pour un professionnel de l'âme!...

Monsieur M, me conduit souvent à me questionner sur le vouvoiement/tutoiement entre patient/psy car il a une vive tendance, récurrente, à me tutoyer, à parfois se reprendre et d'autres fois, non. Dernièrement, encore, et même à distance, lorsque celui-ci m'a appelé pour convenir de notre dernière rencontre, il me fit part de son rhume qui le fatiguait mais dixit: -"J'ai envie de venir te voir et de te euuuh, vous parler."

Notre rencontre venue, celui-ci se montre toujours intimidé et en "perte de son français". Il me sollicite pour que je lui pose des questions, ce que je fais délicatement pour réenclencher un certain confort chez lui. Je cherche donc à nous remettre sur la même voie. Ainsi, il en profite enfin pour me regarder à chaque question ou chaque éclairage et en vint à me dire en rassemblant ses mains vers son visage et en se frottant densément les yeux: "Ce regard que vous avez, j'vais m'arracher les yeux, c'est pas possible! Ah oui, c'est un regard... Tu vois, euh voilà c'est comme le hasard pendant une rencontre amoureuse, y a le regard puis..." 

Devrais-je rebondir sur ses phrases non terminées ou analyser toujours plus...: La méconnaissance, confuse qu'a cet homme de lui-même, méconnaissance qui lui convient à ce jour puisque d'après lui, celui-ci, "craint de se poser, quelque part, se sent bien parmi tous ses questionnements, a peur de voir ce qu'il veut vraiment et de tomber ainsi dans une routine. En fait, je sais tout, vous me dites des choses vraies et certaines que je sais mais auxquelles je pense pas. Je sais depuis que je viens parler avec vous, que je me connais pas bien et parler avec vous, ça me permet de mieux m'en rendre compte mais ça fait peur hein. Puis j'ai beau lire et lire, enfin feuilleter des bouquins, je trouve jamais ce que je voudrais vraiment savoir sur moi. Mais en fait, est-ce qu'on veut vraiment savoir qui on est! C'est la question! Ce que je connais moins bien de moi et qui m'amène à toujours me poser des questions, jveux pas que ça change quelque part...Ouais...Ca me convient de pas tout connaitre de moi".

"Éviter la routine", c'est selon lui et pour lui, "profiter" des genres sexuels de l'Humain, "être attiré par le sexe masculin, féminin, transexuel, plus que par le besoin et l'envie d'aimer". Ce patient est venu me consulter "parce que la femme" avec qui il était avait mis fin à leur relation "suite à ses tromperies, du coup, à ses mensonges, et son égoïsme". Mentir qui est pour lui, inévitable dans une relation... Je le conduis à approfondir ce fait, il en vient à me répondre tout en me questionnant "Mais de toute façon, on se ment tous à nous-même"... Au bout de nombreuses séances, celui-ci me dit encore aujourd'hui qu'"on se rend compte de ce que l'on perd, trop tard"... Boum badaboummm, ce patient a de nouveau vocalisé le refrain qui chaque jour, tourne dans ma tête... La triste pensée dont je me suis toujours servie pour mesurer tout ce que j'ai, toutes les personnes que j'aime... Les mots qu'en période de désenchantement, j'aimerais cracher à la figure de ceux qui abîment les Êtres qui font le temps. La pitoyable conséquence de certains comportements d'autrui qui nous repoussent et nous terminent.

Il y a des jours où le psychologue n'est pas enclin à entendre et réfléchir sur certaines choses qui tourmentent à ce moment précis sa vie personnelle et pourtant, il faut rester bienveillant, patient, neutre, à l'écoute, observateur,... Il faut se dire qu'un Vouvoiement (Vous-Voie-Ment) (->"A vous aussi je peux être amené à mentir et dire ce que je veux". Mr M) manqué ou attentionné, peut se révéler très révélateur et significatif...

Il y a des jours et de redoutables lonnnnngues minutes selon les problématiques des patients, où l'on sait qu'il va falloir garder le contrôle de soi tout en entrant/restant dans l'âme du patient le temps de la séance et ne pas lui incomber, en cette journée de sensibilité personnellement trop accrue, qu'il se doit de vouvoyer "son psychologue!" ... Mais d'ailleurs, pourquoi le vouvoiement est-il de mise? Pourquoi le tutoiement installe malaise chez certains collègues? Pourquoi tous mes patients qui en arrivent à furtivement me tutoyer, se reprennent sur le mode du vouvoiement et ne s'excusent de leur "erreur/maladresse"? Je terminerais en soulevant le fait que le vouvoiement/tutoiement impulsé par le psychologue (selon le terrain de pratique et les sujets), comme propulsé par le patient (quel que soit le domaine d'exercice du psy et la patientèle accueillie), doit-être analysé! Il sert grandement à l'échange et au travail à effet thérapeutique! Reste à savoir lequel s'applique à tel type de population et de public!... J'en viendrais probablement à publier un article sur cela.

 

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Commentaires
L
Quel article qui soulève de multiples réflexions!!!! <br /> <br /> <br /> <br /> Au sujet du vouvoiement/tutoiement, peut-être cela survient-il où le climat de confort instauré par la psychologue est justement tellement bien installé que le patient en oublie toute convention sociale? <br /> <br /> Peut-être aussi que dans sa réflexion le psychologue devient pour lui reflet de son âme et qu'il semble se parler à lui-mêmle d'où l'emploi du tu? <br /> <br /> <br /> <br /> Que penser des pays anglosaxons, et de l'unique "you" pour signifier à la fois la 2ème personne du singulier ET du pluriel ? où se situe alors le tu du vous?
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